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Voici le «Guide des grades des monnaies du Canada» édité par l'Association des numismates et des philatélistes de Boucherville inc. Auteur : André Langlois


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Articles - Timbres
Textes publiés dans le Bulletin de liaison de l'association concernant la collection des timbres et la philatélie
2003-02-01
Les vignettes de la SSJB [2]


Claude Bélanger

Pourquoi des vignettes de la SSJB ?

Pourquoi la SSJB a-t-elle commencé à émettre de telles vignettes ? Dans l’introduction à son album, Jean Lafontaine mentionne, avec beaucoup d’à-propos, les efforts de la SSJB pour amener le Ministère des Postes à commémorer le centenaire de l’incorporation de Montréal et célébrer l’arrivée de Jacques Cartier en 1534. Mais le Ministère des Postes émettait peu de timbres à cette époque et les émissions commémoratives étaient encore plus rares. La SSJB a donc partiellement essuyé un refus (en 1934 le Ministère émettra un timbre commémorant Cartier — Scott #208). Ce serait pour palier à ce refus partiel que la Société aurait commencé à émettre des timbres en 1934.

Il existe sûrement une autre raison pour expliquer ces émissions : les années trente furent une période intense de nationalisme au Québec. La grande crise économique qui débute en 1929, l’urbanisation rapide et l’industrialisation de la province ont provoqué des heurts, des dislocations, des changements, l’abandon de traditions, la prolétarisation progressive des Québécois qui choquent plusieurs nationalistes. Le peuple québécois est devenu pauvre, sa langue est bafouée dans les hautes sphères économiques, le gouvernement fédéral refuse d’émettre de la monnaie bilingue; tout concorde pour plonger la province dans un état de torpeur et d’infériorité. En réaction, de grandes campagnes sont organisées dont le but principal est de restaurer la fierté des Québécois, de leur redonner confiance en eux-mêmes. Ces nationalistes clament — pour reprendre l’expression du chanoine Lionel Groulx — “ Notre maître le passé ”. C’est par l’étude et l’exemple des grandes œuvres des générations passées, par l’histoire, que les Québécois trouveront, pensent-ils, l’inspiration et le courage pour relever la tête.
 
Centenaire de St-Jérôme

Des campagnes à forte saveur historique seront organisées. Des macarons, des drapeaux, des timbres seront émis, des “ pèlerinages ” aux sites historiques seront organisés. L’année 1934 voit l’apparition non seulement des vignettes de la SSJB mais aussi l’émission de timbres pour célébrer le centenaire de St. Jérome et le tricentenaire de Trois-Rivières.  Les points culminants de ces campagnes nationalistes seront la commémoration de la Rébellion de 1837 et les célébrations du tricentenaire de Montréal en 1942. Quand elle se met à émettre des timbres, à partir de 1934, la SSJB participe donc à un mouvement général dont le but est d’inspirer une ferveur nationaliste à la population québécoise.
 
Vignette du tricentenaire de Trois-Rivières

Que trouve-t-on sur les vignettes de la SSJB ?

Au cours de la période de 1934 à 1967, la SSJB émettra 66 vignettes différentes. Comme un bon nombre de ces vignettes fut émis en plusieurs couleurs, nous avons un total de 165 timbres différents. La période de la Nouvelle-France (1534-1760) nous donne 30 vignettes (45.4%); celle de la période britannique (1760-1867) est commémorée par 16 timbres (24.3%) tandis que la période post-confédérative (1867 à 1967) est représentée par 20 émissions (30.3%). On a donc une assez bonne représentation de toutes les périodes, avec tout de même un avantage pour la Nouvelle-France. Pour les nationalistes traditionnels, la Nouvelle-France était perçue comme une espèce d’âge-d’or dans l’histoire des Québécois.

Ce sont les sujets religieux qui sont les plus nombreux (26 vignettes) : on y retrouve plusieurs évêques (Mgrs de Laval, Lartigue, Bourget, Taché, Laflèche, Forbin-Janson, Langevin), de nombreuses religieuses (Mère d’Youville deux fois, Mère Marie-Rose, Mère Marie-Anne, Mère Gamelin, etc.), des membres du clergé (abbé Groulx, Cyprien Tanguay, Marie-Victorin, Mathurin Bourg), plusieurs fondatrices de congrégations religieuses, des églises. Ces nombreux sujets religieux représentent l’importance du clergé catholique  dans l’histoire canadienne-française. Mais ils reflètent aussi la conception très catholique de la nationalité canadienne-française qu’avaient les nationalistes de l’école qu’on appelle “ clérico-nationaliste ”, dont faisait partie la SSJB dans les années trente. Pour eux, la première particularité du Canadien français était qu’il était catholique, avant même d’être de langue française.

On commémore aussi plusieurs explorateurs (Champlain, Cartier, La Vérendrye (deux fois), Cavelier de La Salle, Jolliet, Marquette). Ces vignettes cherchent à montrer le grand rôle joué par les Français dans l’exploration du continent; c’était là une source de grande fierté. Avec les missionnaires (Brébeuf, Bourg, Laflèche, Taché), quelques évêques ayant travaillé hors Québec (Taché, Laflèche, Langevin) et des personnages tels d’Iberville, Riel (chef métis), Ferdinand Gagnon (chef franco-américain) et Jeanne Lajoie (militante franco-ontarienne de Pembroke contre le notoire Règlement 17 bannissant le français des écoles de l’Ontario), on démontrait que les Canadiens français avaient leur place partout sur le continent, qu’ils méritaient considération, qu’on avait tort de les persécuter, qu’ils avaient droit au statut de peuple fondateur du pays, sinon du continent.

Les fondateurs sont honorés par près d’une quinzaine de vignettes. Il s’agit surtout de communautés religieuses. Mais on y trouve aussi Ludger Duvernay, fondateur de la SSJB, et Alphonse Desjardins, fondateur des Caisses populaires.

Fait significatif à noter, les femmes sont représentées par 11 vignettes (Jeanne Mance, Marie de l’Incarnation, Marguerite Bourgeoys, etc.). Cette représentation féminine est inhabituelle. Tous savent que jusqu’à récemment l’édification de l’histoire était un fait d’hommes, de “ grands hommes ”. Ils avaient bien tous eu une mère mais elle vivait dans l’obscurité ! Les nationalistes des années trente prêchaient que les femmes avaient un grand rôle à jouer dans la préservation “ de la race ” et le maintien des traditions. On ne s’étonnera donc pas qu’elles soient bien représentées par les vignettes de la SSJB.

Les timbres de la SSJB honorent dix lettrés : François-Xavier Garneau (notre premier historien national), Adolphe Routhier et Calixa Lavallée (auteurs des paroles et de la musique de l’hymne national) Marie-Victorin (pionnier de la botanique au Québec et fondateur des Cercles naturalistes), Octave Crémazie (poète) Pierre-Basile Mignault (auteur d’une monumentale étude sur le droit civil canadien), Jean-Baptiste Meilleur (auteur d’ouvrages scolaires et surintendant de l’éducation de 1843-1855), Cyprien Tanguay (auteur du dictionnaire généalogique), Jacques Viger (fondateur du Canadien, premier journal publié exclusivement en français au Québec) et Lionel Groulx, historien et nationaliste bien connu. La SSJB a aussi fait un timbre pour célébrer le centenaire de la fondation de l’Université Laval.

On trouve aussi sur les vignettes de la SSJB des événements et des personnages militaires. C’est là un signe que l’on n’a jamais voulu représenter les Québécois comme des pacifistes, malgré leur opposition à la conscription dans les deux grandes guerres. On y trouve dans cette catégorie : D’Iberville (qui fit la guerre de la Baie d’Hudson jusque dans les Antilles et la Louisiane), Lambert Closse (et son inévitable chien Pilote!), Dollard Des Ormeaux (dont le culte était abondamment propagé par les nationalistes de l’époque), Frontenac (“ Je vous répondrai par la bouche de mes canons ”), le Chevalier De Lorimier (rébellion de 1837), Charles-Michel de Salaberry (guerre de 1812). On commémore aussi les batailles de Saint-Denis et de Saint-Eustache (rébellion de 1837). On pourrait aussi compter dans cette catégorie Louis Riel, le célèbre chef Métis de la rébellion du Nord-Ouest, qu’on percevait principalement comme “ un frère ” canadien-français. Avec toutes ces vignettes militaires, qui aurait continué à prétendre que nous descendons d’un peuple de moutons !!!

Une dernière catégorie regroupe quelques politiciens ou des nationalistes qui furent actifs en politique. De façon générale, les politiciens n’avaient pas bonne presse avec les “ clerico-nationalistes ”. On les accusaient de diviser la nation, d’être servile, de ne pas défendre les droits de leurs compatriotes. Néanmoins, les personnages suivants sont honorés par la SSJB : Louis Hippolyte La Fontaine (chef politique de la période de l’Union; il réclama les droits du français), Louis-Joseph Papineau (célèbre leader de la période d’avant 1837), Henri Bourassa (bien connu pour ses luttes anti-impérialistes et ses campagnes pour le bilinguisme), Armand LaVergne (lieutenant de Bourassa) et Paul-Émile Lamarche (l’un des rares politiciens nationalistes de la période 1900-1920 qui demeurera fidèle à son option).

On notera, finalement, que tous les personnages représentés dans les vignettes de la SSJB sont des Québécois francophones et catholiques. Les clérico-nationalistes de l’époque avaient une vision ethnique de la nation. Ils n’avaient pas encore une notion ouverte et civique de la nation. Cette nouvelle vision ne viendra qu’avec la Révolution tranquille.

Somme toute, les vignettes de la SSJB représentent bien la vision nationaliste de l’histoire et des personnages québécois.
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